BARBARA BRZEZICKA – Traduction relevant(e) de Derrida

Barbara BRZEZICKA , « Traduction relevant(e) de Derrida », Traduire Derrida aujourd’hui, revue ITER Nº2, 2020.

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Parmi les nombreux textes que Jacques Derrida a consacrés à la traduction, c’était l’article Qu’est-ce qu’une traduction « relevante » ? qui m’a le plus impressionnée et qui continue à m’inspirer. En fait, c’était plus exactement la traduction de Lawrence Venuti, intitulée « What is a ‘Relevant’ Translation ? », car alors je n’avais pas accès au texte original. Cette traduction, faite par un des traductologues les plus éminents, est peut-être même plus intéressante que l’original. D’un côté, Venuti y emploie les stratégies de traduction qu’il avait toujours prônées – il exotise le texte, en écrivant par exemple : « in what sense it travails, travels, between hôte and hôte, guest and host »[1]. D’un autre côté, on peut dire que la traduction de Venuti est relevante dans le sens voulu par Derrida, alors on peut dire qu’elle relève de la pensée derridienne. Dans ce texte, j’essaierai d’expliquer comment les traductions de Derrida peuvent être relevantes et en même temps « relevant de la philosophie derridienne ». Je vais me baser sur les traductions vers le polonais que j’avais analysées, ainsi que sur ma propre expérience de traductrice. J’essaierai aussi de présenter les difficultés qui se posent si on veut traduire le substantif relève et le verbe relever vers ma langue maternelle et comment cela influence la traduction (toujours à venir) du texte en question. Ainsi, ma démarche tentera de répéter en quelque sorte le geste de Derrida, pour qui relever constitue à la fois la manière de traduire et l’unité de traduction qu’il propose pour traduire le verbe anglais to season dans un fragment de Marchand de Venise.

Qu’est-ce qu’une traduction relevante, donc ? Dans son texte, Derrida se réfère encore une fois à l’intraduisible hégélien Aufhebung. Qu’apprend-on sur ce mot du fameux Vocabulaire européen des philosophies ? Philippe Büttgen commence par tracer l’histoire des traductions de ce terme et conclut que « le débat sur ces deux mots [le verbe et le substantif] est probablement le plus durable, le plus documenté et le plus connu de ceux qui touchent aux problèmes de la traduction philosophique »[2]. La difficulté réside dans le double sens de ce terme que Hegel lui-même commente ainsi :

« Aufheben a dans la langue un double sens qui fait qu’il signifie à la fois quelque chose comme conserver [aufbewahren], garder [erhalten], et quelque chose comme faire s’arrêter [aufhören lassen], mettre fin [ein Ende machen]. Le fait de garder inclut déjà en soi le négatif, au sens où quelque chose se trouve soustrait à son immédiateté et ainsi à son être-là [Dasein], ouvert aux influences extérieures afin de garder son être-là. – Ainsi le Aufgehobene est-il en même temps quelque chose de conservé, à ceci près qu’il a perdu son immédiateté, sans pour autant l’avoir anéantie [vernichtet]. »[3]

En lisant les explications de Hegel, ainsi que celles de ses traducteurs, on s’aperçoit que le concept en soi correspond parfaitement au contexte de la traduction. Tout acte de traduire n’est-il pas un acte de conserver qui anéantit en même temps le texte de départ ? Une « traduction relevante » serait donc un pléonasme, car traduire veut toujours dire aufheben le texte source.

Derrida va plus loin, tout en restant très hégélien dans sa démarche. Il propose de traduire les termes allemands Aufhebung et aufheben par relève et relever respectivement. Pour la première fois, il expose les motifs pour cette traduction dans l’essai « Le puits et la pyramide ». Il explique le participe passé aufgehoben comme la détermination « à la fois élevée et supprimée, disons désormais relevée, au sens où l’on peut être à la fois élevé et relevé de ses fonctions, remplacé dans une sorte de promotion par ce qui succède et prend la relève. En ce sens, le signe est la relève de l’intuition sensible-spatiale »[4]. Le sens de « conserver » devient donc celui d’« élever » ce qui correspond au mouvement dialectique de la Phénoménologie de l’esprit et des autres textes de Hegel. Une traduction relevante, c’est donc une traduction qui est aufhebende (participe présent) dans le sens hégélien, une traduction qui remplace et élève l’original, mais aussi une traduction qui est relevant en anglais – « ce qui touche juste, ce qui paraît pertinent, à propos, bien venu, approprié, opportun, justifié, bien accordé ou ajusté, venant adéquatement là où on l’attend – ou correspondant comme il le faut à l’objet auquel se rapporte le geste dit ‘relevant’, le discours relevant, la proposition relevante, la décision relevante, la traduction relevante »[5]. Finalement, Derrida y ajoute du français le sens « donner un goût plus prononcé à un mets en y ajoutant épices ou assaisonnement »[6] du verbe relever qui peut désormais servir de traduction pour le verbe anglais to season. Les propos de Portia, « When mercy seasons justice » deviennent en français « Quand le pardon relève la justice »[7], ce qui permet de relever le texte de Shakespeare, le dépasser, l’enrichir, l’élever et en même temps garder le sens pertinent, approprié, qui correspond au vouloir-dire de Portia. L’emploi du verbe relever permet de découvrir « ce qui attendait ou à réveiller ce qui dormait dans la langue »[8] et de relever l’original, en le traduisant.

Peut-on ainsi relever les textes de Derrida ? Sans doute, dans chaque langue cible il y a des possibilités endormies qui attendent à être découvertes. C’était le cas de Barbara Johnson, traductrice de la Dissémination vers l’anglais, qui dans la préface à l’édition anglaise, dit que « l’on pourrait presque croire (…), que (…) La Dissémination avait pendant tout ce temps attendu l’homonymie anglaise entre sow et sew »[9]. Cette homonymie permet et oblige de relever la traduction anglaise du texte derridien.

Y a-t-il de telles possibilités cachées dans la langue polonaise ? Certes, mais avant d’en entreprendre la recherche, il faut s’arrêter sur les traductions des termes relève et relever. En fait, il s’agit de toute une histoire des traductions. Malheureusement, ce n’est pas une « histoire des traductions » dans le sens que lui a donné Jean-René Ladmiral : une évolution vers plus d’exactitude ou plus de rationalité[10]. S’il y a une logique dans les traductions successives, elle ne relève pas d’une approche critique et rationnelle, mais plutôt d’une attitude opposée : vénération pour le traducteur et le commentateur le plus influent de Derrida en Pologne, c’est-à-dire Bogdan Banasiak. Ce qui est un peu paradoxal, c’est qu’il n’a même pas inventé l’équivalent polonais de relève, il l’a simplement repris d’une des premières traductions de Derrida vers le polonais : celle de « La différance » faite par Joanna Skoczylas et publiée en 1978 dans le fameux recueil Drogi współczesnej filozofii (Les chemins de la philosophie contemporaine), qui a permis aux lecteurs et lectrices polonais de découvrir les écrits de Michel Foucault, Gilles Deleuze, Jürgen Habermas et Jacques Derrida (entre autres). Dans « La différance », Derrida n’explique pas sa démarche, il emploie tout simplement relève dans une phrase sur Hegel : « On plie l’Aufhebung — la relève — à s’écrire autrement »[11]. La traductrice a décidé d’employer un verbe qui correspond au contexte de « Le puits et la pyramide », mais beaucoup moins au sens hégélien du mot. Elle traduit relève par luzowanie – un substantif verbal qui vient du verbe luzować. Ce dernier peut être employé dans le sens de « relever de ses fonctions », surtout dans le contexte militaire de la garde, où un soldat remplace l’autre. Mais le verbe possède aussi d’autres significations. Son premier sens est celui de « réduire la tension et la contrainte, desserrer » : on peut luzować un nœud, des cordons serrés, des lacets des chaussures ou un boulon pour dérégler un mécanisme. Il est donc bien évident que parmi les sens derridiens de relever, seul le sens de « remplacer » est gardé, tandis que les autres disparaissent et que les nouveaux sens divergent nettement des sens de départ.

Cette divergence peut-elle être considérée comme une traduction relevante  ? Au premier regard les champs sémantiques divergent trop et on a l’impression que le choix terminologique relève d’une erreur. En fait, il n’y a qu’un commentaire traductologique du terme et on le trouve dans la retraduction de l’essai « Le puits et la pyramide » faite par Janusz Margański. Il y écrit que « le terme derridien relève a été traduit ‘zluzowanie’ par Bogdan Banasiak dans la première édition du Puits et la pyramide (…). Je reproduis ce geste »[12]. La notoriété de Banasiak est donc la seule justification de ce choix. En outre, l’explication n’est pas tout à fait exacte. Comme on avait dit, Banasiak ne fait que reproduire le geste de Joanna Skoczylas, mais sa renommée a contribué à l’établissement d’une équivalence qui n’est plus mise en question. On peut même dire que le terme a contribué à l’évolution du vocabulaire philosophique et celui des études littéraires en Pologne. Anna Burzyńska utilise « luzowanie » dans sa théorie littéraire. La pensée derridienne y constitue un point de départ, mais la chercheuse l’utilise pour forger son propre outil d’analyse. Chez elle, « luzowanie » perd sa dimension verticale, héritée de Hegel. Il ne s’agit plus d’élever, d’aller vers le haut. Pour elle, « luzowanie » consiste à briser quelque totalité de l’intérieur pour en délocaliser les éléments de manière à ne plus permettre leur unification[13]. C’est le sens polonais qui s’ajoute à la démarche théorique, celui de desserrer une vis ou un boulon, ce qui dérègle le mécanisme. Bogna Choińska écrit que « luzowanie » à la fois répète et singe, se moque de l’Aufhebung hégélien[14]. Peut-être la démarche qui consiste à se défaire de cette verticalité hégélienne, toujours liée avec un jugement de valeur, s’inscrit-elle dans la démarche derridienne ? Elle semble s’accorder avec la déconstruction. La traduction s’avère donc involontairement relevante – elle n’exploite pas la possibilité cachée dans la langue, mais elle ouvre une voie d’interprétation qui remplace et enrichit le terme de départ.

Faudrait-il donc traduire « traduction relevante » en « przekład luzujący » ? C’est un choix fort risqué et qui s’éloigne sans doute des sens de l’adjectif anglais relevant et fait disparaître toute référence à la signification anglaise de relevant et la Relevance Theory[15]. D’un autre côté, il ouvre la voie aux autres sens. La traduction luzuje (elle relève) desserre alors les liens et les contraintes qui limitent notre compréhension, elle permet plus de liberté de mouvements, plus de points de vue. En même temps, elle desserre les vis et les boulons qui totalisaient un mécanisme, pour en montrer les éléments et pour permettre de les déplacer, de bricoler avec eux. Même si le traducteur ou la traductrice à venir ne va pas opter pour ce terme, il faudrait l’inclure en quelque sorte dans la traduction. Vu que le texte en question a déjà fait naître plusieurs commentaires concernant sa traduction et même la traduction de ces commentaires, comme dans le cas de « Translating Derrida on Translation : Relevance and Disciplinary Resistance » de Lawrence Venuti[16] et de la traduction française de ce texte faite par René Lemieux[17], il semble pertinent de faire accompagner la version polonaise d’un commentaire traductologique qui pourra présenter « l’état des lieux » des traductions vers le polonais et les autres langues.

Y a-t-il d’autres possibilités qui dorment dans la langue polonaise et que l’on peut découvrir à travers une traduction relevante  ? Le polonais, comme l’allemand, possède beaucoup de « doublets » terminologiques, tels que le couple Objekt et Gegenstand analysé par Jean-René Ladmiral dans un texte de Marx[18]. À part les termes philosophiques d’origine latine, il y a souvent des termes plus ou moins synonymiques d’origine slave. À cela s’ajoute la multiplicité des termes qui peuvent correspondre à un terme français. Il n’est pas rare qu’une polysémie française se trouve explicitée dans l’ensemble des équivalents polonais. Cela peut être vu comme une difficulté, mais en même temps les termes polonais peuvent aider à comprendre les polysémies qui apparaissent si souvent dans les textes de Derrida.

Si on regarde la courte histoire des traductions de Derrida en Pologne, on peut discerner quelques stratégies des traducteurs et traductrices qui peuvent être considérées comme relevant de la pensée derridienne. Il s’agit surtout des traductions créées après 1989 – celles venant de l’époque de PRL n’essayaient pas tellement d’être « derridiennes » en soi et relevaient plutôt de l’approche personnelle des traducteurs et des contraintes du discours académique.

Les années 1990 ont vu un foisonnement des traductions – pour la plupart des essais ou chapitres publiés dans de nombreuses revues. Une quinzaine des traducteurs représente des styles et des stratégies différentes, ainsi que plusieurs types d’incompétence. L’exemple le plus éminent de cette période, c’est sans doute Bogdan Banasiak. Ce philosophe de Łódź a eu une grande influence sur la réception de Derrida en Pologne. Il fut traducteur des livres et des fragments, rédacteur du premier recueil des textes paru en 1992, commentateur et figure d’autorité dans les débats philosophiques. Malheureusement, ses traductions ont largement contribué à la mauvaise réputation de Derrida en Pologne. Le philosophe n’est sûrement pas facile à comprendre, mais ses textes sont beaucoup plus clairs en français que dans les traductions de Banasiak. Or, le traducteur se révèle incompétent à plusieurs égards. Premièrement, en analysant ses traductions, on a souvent l’impression qu’il n’a pas compris le texte source à cause de la simple incompétence linguistique – parfois les sens secondaires des mots simples lui échappent, comme dans le cas de présent employé comme synonyme de cadeau, ou d’articulation dans son sens anatomique[19]. Ensuite, vient l’incompétence au niveau du polonais. Ses phrases sont souvent calquées sur la syntaxe française, ce qui ne correspond pas à la syntaxe polonaise. Ce style a été d’ailleurs critiqué en détail (et sans pitié) par Michał Paweł Markowski[20]. À tout cela s’ajoutent les défauts au niveau des références. Banasiak a parfois des problèmes à identifier correctement telle ou telle allusion, comme la référence à Entwurf einer Psychologie de Freud dans « La différance »[21]. Il lui est arrivé aussi de changer le nom cité par Derrida dans De la grammatologie : « On pourrait dire que pour Rousseau déjà, le concept (…) existe comme temps. Celui-ci en est, comme dira Hegel, le Dasein »[22]. Dans la version polonaise, c’est Heidegger qui dira Dasein[23] Dans les autres traductions des années 1990 on trouvera aussi des fautes qui viennent ou bien de l’incompétence linguistique, ou bien des manques de connaissances en philosophie. Ce dernier problème vient souvent du fait que Derrida est particulièrement populaire parmi les chercheurs en littérature, qui n’ont souvent pas de préparation philosophique. L’exemple extrême de ce dernier problème, c’est la traduction de nous grec (bien explicité dans le texte de départ) par le pronom personnel my, ce qui rend évidemment absurde tout un paragraphe des Politiques de l’amitié traduites par Adam Dziadek[24].

Les années 2000 ont vu la plus grande exotisation de Derrida. D’un côté, les traducteurs et les traductrices deviennent plus visibles grâce au paratexte – les notes de bas de page ou les termes français entre parenthèses. D’un autre côté, cette tendance fait apparaître parfois des traductions bizarres et difficiles à lire. On pourrait dire que la néologie est une stratégie relevant du style derridien, mais il ne faut pas oublier qu’elle est très difficile à utiliser et qu’elle peut décourager les lecteurs (ce qui fut souvent le cas). En plus, ces traductions se voulant fidèles à plusieurs égards sont souvent calquées et ne correspondent pas à la syntaxe polonaise.

La tendance à exotiser les textes en recourant à la néologie et aux formes syntaxiques calquées disparaît quasiment dans les années 2010. On peut toujours observer certains néologismes, comme mondializacja dans la traduction de L’Université sans condition faite par Kajetan Maria Jaksender[25], mais ils sont moins exotiques et beaucoup plus rares. On peut dire que tous les traducteurs et traductrices essaient en quelque sorte de créer une traduction relevant de Derrida, mais les stratégies diffèrent. Pour Tomasz Swoboda, une traduction qui relève de Derrida, c’est une traduction littéraire. Dans la version polonaise de l’essai Les yeux de la langue, le traducteur n’est pas toujours cohérent en ce qui concerne les termes, mais il puise dans les possibilités littéraires endormies dans la langue polonaise. Swoboda reste donc fidèle à Derrida, qui dépassait la frontière entre la philosophie et la littérature.

Pour moi, la traduction relevant du texte derridien, c’est surtout une traduction plurilingue. Il est rare de trouver un texte de Derrida qui ne contienne pas des mots grecs, latins, allemands et d’autres transcrits tels quels. Une fois la notion expliquée, le philosophe continue à l’employer dans sa forme originale, en laissant entendre qu’aucun terme n’est pleinement traduisible. Dans le texte De l’esprit que j’ai traduit vers le polonais, l’allemand heideggérien est ineffaçable et les termes grecs et latins, tels que pneuma ou spiritus ne sont pas moins importants. Vu le plurilinguisme du texte source, il me paraît appauvrissant de traduire chaque mot français vers le polonais, en effaçant les aspects intraduisibles des termes derridiens. Dans la version polonaise, il y a donc plusieurs mots français mis entre parenthèses, ce qui ajoute encore une couche linguistique à ce texte déjà bourré de mots étrangers en italique. Ajouter la visibilité du français dans les traductions est donc une traduction relevante dans le sens derridien – on ne réveille pas ce qui dormait dans la langue cible, mais plutôt l’aspect intraduisible de la langue source. On est toujours plus sensibles aux nuances de signification dans une langue étrangère qu’on connaît bien et notre langue maternelle est souvent un « verre transparent »[26] pour celui ou celle qui écrit. Pour Derrida, la langue française était toujours un verre coloré, mais la pratique de la traduction fait apparaître de nouvelles couleurs du français et le texte cible peut en rendre compte et réveiller ces couleurs endormies dans le texte de départ.

Les termes français entre parenthèses apparaissent aussi dans les traductions de Tomasz Załuski (Spectres de Marx et L’autre cap) qui de plus se font visibles dans le paratexte. Grâce à des postfaces et des notes de bas de page, on a pu établir un véritable dialogue sur les choix traductologiques concernant le corpus derridien. Je crois que c’est précisément ce dialogue qui distingue la décennie actuelle des précédentes. Même si nos positions théoriques diffèrent considérablement (comme la mienne et celle de Tomasz Swoboda), on en discute et on est conscient des choix des autres. Les traductions sont moins souvent créées en isolation, comme c’était parfois le cas dans les années 1990 et 2000. En outre, le corpus des traductions que j’avais établi dans ma thèse[27] sert de référence et permet d’élaborer sa stratégie de traduction de manière plus informée. De nouveaux textes apparaissent presque chaque année et j’espère que le corpus derridien en polonais continuera à s’élargir.

En écrivant ce texte, j’ai appris qu’il sera peut-être possible de faire traduire le texte avec lequel j’ai commencé ci-dessus. Ainsi, on pourra compléter l’œuvre traductologique de Derrida traduit vers le polonais. Vu que dans Qu’est-ce qu’une traduction « relevante » ?, il est impossible de faire disparaître le vocabulaire hégélien allemand ou le texte anglais de Shakespeare, la traduction devra probablement faire apparaître l’aspect intraduisible de la relève française. Il faudra aussi se positionner par rapport au terme luzowanie déjà bien implanté dans le vocabulaire de la philosophie et de l’analyse littéraire polonais. J’espère me prouver digne de cette tâche et savoir relever le défi.

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[1] Jacques Derrida, « What is ‘Relevant’ Translation ? », trad. L. Venuti, Critical Inquiry, 2001, t. 27, n° 2, p. 176.

[2] Philippe Büttgen, « Aufheben, Aufhebung », in: B. Cassin (éd.), Vocabulaire européen des philosophies, Seuil / Le Robert, Paris, 2004, p. 152.

[3] Georg Wilhem Friedrich Hegel, Science de la logique, cit. après : ibidem, p. 153.

[4] Jacques Derrida, Marges de la philosophie, Les Éditions de Minuit, Paris, 1972, p. 102.

[5] Jacques Derrida, Qu’est-ce qu’une traduction « relevante » ?, Éditions de l’Herne, Paris, 2005, p. 16.

[6] Dictionnaire de Larousse en ligne, <span »>https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/relever/67885 ?q=relever#67134</span »> (consulté le 13 avril 2019).

[7] Jacques Derrida, Qu’est-ce qu’une traduction « relevante » ?, op. cit., p. 62.

[8] Ibidem, p. 70.

[9] « One might almost believe (…), that (…) Dissemination had been waiting all along for the English homonymy between sow and sew’ » – Barbara Johnson, « Translator’s Introduction », in: Jacques Derrida, Dissemination, trans. B. Johnson, The Athlone Press, London, 1981, p. xix. 

[10] Jean-René Ladmiral, « Éléments de la traduction philosophique », Langue française, 1981, t. 51, p. 30.

[11] Jacques Derrida, La différance, in Marges de la philosophie, Les Éditions de Minuit, Paris, 1972, p. 21.

[12] « Derridiański termin releve jako zluzowanie przełożył Bogdan Banasiak w pierwszym wydaniu Szybu i piramidy (…). Podejmuję ten gest », Janusz Margański, note du traducteur, in Jacques Derrida, Marginesy filozofii, trad. A. Dziadek, J. Margański, P. Pieniążek, Wydawnictwo KR, Warszawa, 2002, p. 123.

[13] Anna Burzyńska, Anty-teoria literatury, Universitas, Kraków, 2006, p. 13 et suivantes.

[14] Bogna Choińska, « Bez czystego cięcia” – cel (la fin) interpretacji czy kres (la fin) życia ? », Diametros, n° 37, 2013, p. 9.

[15] Le contexte de la Relevance Theory a été analysé par René Lemieux : « Retour de Babel : l’indécidabilité derridienne et la rétrotraduction en supplément », Punctum, n° 1(2), 2015, p. 69, 76-77.

[16] Lawrence Venuti, « Translating Derrida on Translation : Relevance and Disciplinary Resistance », The Yale Journal of Criticism, vol. 16, n° 2, 2003, p. 237-262.

[17] Commentée dans : René Lemieux, « Retour de Babel : l’indécidabilité derridienne et la rétrotraduction en supplément », op. cit.

[18] Jean-René Ladmiral, « Éléments de traduction philosophique », art. cit., p. 24.

[19] Jacques Derrida, « Ojciec logosu », trad. B. Banasiak, Colloquia Communia, 1988, n° 1–3, p. 305, 307.

[20] Michał Paweł Markowski, „Przy ryzyku, że będzie to zaskoczeniem”. Uwagi o tłumaczeniu Derridy, „Literatura na Świecie” n° 11–12, 1998, p. 248–261.

[21] Jacques Derrida, « La différance », op. cit., p. 19.

[22] Jacques Derrida, De la grammatologie, Les Éditions de Minuit, Paris, 1967, p. 271.

[23] Jacques Derrida, O gramatologii, trad. B. Banasiak, Wydawnictwo Officyna, Łódź, 2011, p. 250.

[24] Jacques Derrida, « Oligarchie. Wymienianie, wyliczanie, obliczanie », trad. A. Dziadek, Poznańskie Studia Polonistyczne, n° 17, 2010, p. 167.

[25] Jacques Derrida, Uniwersytet bezwarunkowy, trad. K.M. Jaksender, Wydawnictwo Libron/Wydawnictwo Eperons–Ostrogi, Kraków, 2014, p. 14-15.

[26] Georges Mounin, Les Belles infidèles. Essai sur la traduction, Cahiers du Sud, Marseille, 1955, p. 109.

[27] Barbara Brzezicka, Problematyka przekładu filozoficznego. Na przykładzie tłumaczeń Jacques’a Derridy w Polsce, Wydawnictwo Naukowe PWN, Warszawa, 2018.


Source Image : Jacques Derrida, Marginesy filozofii, trad. A. Dziadek, J. Margański, P. Pieniążek, Wydawnictwo KR, Warszawa, 2002